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La véritable éthique biblique du travail

Le dramaturge new-yorkais Elmer Rice (1892-1967) est surtout connu pour sa pièce de 1923, The Adding Machine (La machine à calculer). Son principal personnage, M. Zéro, passe 25 ans de sa vie à faire des calculs pour le rayon d'un magasin jusqu'à ce qu'on le remplace par une machine. Dans un accès de rage, M. Zéro tue son patron, puis il se retrouve obligé de faire des additions et des soustractions en enfer. Pour M. Zéro, la vie se résumait à poinçonner sa carte de présence et à recevoir un salaire ponctuel. C'était une existence vide de sens qui a abouti à une éternité absurde. Dans cette pièce, Rice a brossé une satire de l'éthique de travail protestante. Il avait tort. L'éthique de travail protestante, ou plutôt chrétienne, ne se borne pas à la ponctualité et au profit, loin de là.

La sinistre conception de l'éthique de travail de Rice est attribuée à Max Weber, auteur de L'éthique protestante et l'esprit du capitalisme, publié pour la première fois en 1905.1 Weber a associé l'exaltation du travail des Réformateurs à l'essor de la cupidité capitaliste. Cette thèse ne doit pas rester sans réponse, sans quoi la conception divine du travail se perdra. Deux éminents penseurs ont beaucoup fait pour rétablir une conception biblique du travail : le théologien Carl F. H. Henry (1913-2003) et Sir Fred Catherwood (1925 - ), homme d'affaires et politicien britannique. Henry a réfuté la thèse de Weber soutenant que l'éthique de travail chrétienne n'a qu'un lointain rapport avec l'éthique moderne du « succès ». Catherwood a poursuivi son argumentation en expliquant en termes positifs ce qu'implique le fait d'être un chrétien « travailleur ».2

Cinquante ans après le début de The Adding Machine, Henry a défié une génération de jeunes censés condamner le capitalisme en se révoltant contre l'éthique de travail protestante. Henry voulait leur faire comprendre que le capitalisme n'équivaut pas à l'éthique de travail protestante ; en fait, la société laïque, comme il l'a affirmé, « est presque entièrement coupée de ses racines chrétiennes ».3 En réalité, Henry a attribué l'« éthique du succès » de l'Amérique actuelle beaucoup plus aux retombées des histoires de riches d'Horatio Alger (1832-1899) qu'à la théologie de Luther ou de Calvin.4 Les Écritures approuvent une dure journée de labeur (le cœur de la philosophie d'Alger), mais si on la réduit à cela, l'éthique de travail du chrétien devient une éthique laïque du travail, donc un « rejet radical du christianisme… davantage motivé par la rébellion spirituelle que par le sérieux éthique ».5 Henry était clair : travailler avec acharnement dans le seul but d'en tirer profit, ce n'est pas travailler pour le Seigneur — celui-ci a un plus grand objectif en vue concernant notre tâche.

Catherwood a expliqué que le dessein de Dieu, en ce qui concerne le travail, ne se borne pas à poinçonner une carte de présence ou à toucher un salaire, mais a pour but d'honorer le Seigneur et d'aimer son prochain. L'Éternel est honoré lorsque ses créatures manifestent la créativité et l'efficacité avec lesquelles il a créé le ciel et la terre. Les travailleurs chrétiens innovent donc, améliorent ce qui existe déjà et donnent leur maximum. Selon Catherwood, le chrétien « a le devoir de se former et de développer ses talents, tant par l'étude que par l'expérience, dans la limite que lui laissent ses autres responsabilités. Il ne doit s'arrêter que lorsqu'à l'évidence, il a atteint son potentiel maximum. »6 De plus, les chrétiens aiment leur prochain en montrant à leurs amis non chrétiens l'exemple d'une vie tranquille et laborieuse. En obéissant à l'ordre divin de travailler, le croyant, d'après Catherwood, « démontre la nature et l'objectif du Seigneur à ceux qui ne croient pas… »7 Oui, le travail acharné peut constituer un moyen d'évangéliser les autres !

La société a besoin des mises au point proposées par Henry et Catherwood. Non seulement le concept de travailler dur est décrié actuellement, mais lorsque les gens d'aujourd'hui entendent parler de « l'éthique de travail protestante », ils ne pensent trop souvent qu'au sinistre univers de The Adding Machine (qui a été rejouée au théâtre aux États-Unis et en Angleterre), au désespoir muet de Willy Loman dans Death of a Salesman (Mort d'un vendeur) et à la triste existence d'un actuaire d'assurances dans le film d'Alexander Payne sorti en 2002, About Schmidt (À propos de Schmidt).

Il incombe à l'Église de raconter une histoire différente et meilleure. Certes, le travail est ardu et parfois ingrat, mais il est toujours glorieux. De même qu'un jeune enfant est rit et jubile lorsque son père le laisse participer à la vaisselle, le chrétien doit se réjouir de sa tâche, car la femme d'intérieur, le plombier et le PDG ne se contentent pas de lacer des souliers, de souder des tuyaux et de faire des bénéfices : ils accomplissent les desseins de Dieu.

Notes :
1

Voir l'article du Journal Kairos : « L'éthique de la paresse de l'athée ».

2

Voir l'article du Journal Kairos : « Zèle pieux en Australie ».

3

Carl F. H. Henry, “The Christian Work Ethic,” Christianity Today (7 janvier 1972), p. 23.

4

Horatio Alger (1832-1899) a décrit le Rêve américain dans une série d'ouvrages presque aussi populaires que ceux de Mark Twain. Il a convaincu sa nation qu'en dépit d'origines modestes, tous pouvaient parvenir au succès en travaillant dur et en restant intègres.

5

Henry, p. 23.

6

Fred Catherwood, “The Protestant Work Ethic: Attitude and Application Give It Meaning,” Fundamentalist Journal 2 (septembre 1983), p. 23.

7

Ibid., p. 22.


Texte biblique de la Nouvelle Edition de Genève Copyright ©1979 Société Biblique de Genève Reproduit avec aimable autorisation. Tous droits réservés.